Ouverture du compte de Eileen Nemerosa

Tout le monde se bousculait, tout le monde avançait, méfiant, aux aguets, comme si un sort pouvait tomber de n’importe où. Bon nombre de personnes avançaient cachées par une cagoule, une capuche et une cape, bref, l’heure était à la peur, aux ténèbres. Enfin, cela semble logique lorsque l’on sait que le seigneur des Ténèbres a enfin réalisé son rêve, prendre possession du monde magique, et va bientôt éradiqué celui des moldus. Comme quoi, la minorité n’est pas forcément la plus faible. Et les conséquences sont là. Autrefois, avancer parmi cette foule sans se faire dégommer relevait de la chance, aujourd’hui, cela relèverait du miracle. Alors imaginer le calvaire pour une aveugle ! La pauvre petite Eileen avançait, ses yeux blancs cachés par des lunettes de soleil. Elle avait une cane pour s’aider, bien sûr. Le moindre mouvement dans l’air lui indiquait une présence, et elle pouvait la situer. Mais au milieu de cette foule, cela devenait réellement difficile. Elle connaissait le chemin de Traverse, et savait à peu près quelle direction prendre, et se laissait porter par la foule. Mais les chutes venaient en trop grand nombre, et elle reçut plusieurs écorchures aux mains et aux genoux.

Enfin, les voix, les bruits, lui apprirent qu’elle était devant la banque, où le monde se faisait moins présent. Le sol changea sous ses pieds, mais son habitude l’empêcha de tomber. La pression de l’air sur son visage lui indiqua quand elle fut devant la porte, et elle pu pénétrer dans le bâtiment en conservant un peu de dignité. Heureusement pour elle, ce n’était pas un jour de grande fréquentation. Elle poussa un soupir de dépit en entendant les gobelins. Comme elle aurait souhaité les voir ! Une fois de plus, elle se trouva stupide de penser de telle chose ; elle devait accepter ce sort. Puis elle soupira à nouveau. Comment allait-elle se repérer dans ce noir qu’était le monde pour elle ? Elle aurait du demandé à quelqu’un de l’accompagner. Elle baissa la tête, avant de se reprendre, se concentrant pour essayer de capter quelques informations qui lui permettraient de connaître la direction à prendre pour ouvrir son compte. Elle finit par entendre les indices nécessaires, et avec un soupir de soulagement, se dirigea vers la bonne direction. Au cas où , elle avait appris quelques sorts qui lui permettaient d’être guidée dans la bonne direction. Mais elle n’avait pas envie de montrer à tous son handicap.

Alors qu’elle arrivait devant la porte de la salle des rendez-vous, elle entendit des pas précipités et avant qu’elle ait pu réagir, elle fut projetée au sol, tandis que ses lunettes et sa cane volaient un peu plus loin. Un gobelin lui hurla quelques chose du style « vous ne pouvez pas regarder où vous allez ?! », et elle pu ainsi le situer dans l’espace, posant son regard blanc sur l’endroit où elle estimait, avec justesse, qu’il se trouvait. Et c’est avec douceur qu’elle répondit un simple

« Non »

Au même moment, Selene sortait de son bureau. Elle fut d'ailleurs bien offusqué par la scène, du moins c'est ce que l'expression de son visage semblait dire. Elle s'avança rapidement vers eux, lançant un regard rempli de foudre au goblin.

- Combien de fois vais-je devoir vous rappeler que la politesse est de mise lorsque vous vous adressez aux sorciers qui viennent à Gringotts?

ragea-t-elle à l'intention de celui-ci. Elle ramassa au passage la canne et les lunettes de la jeune fille, puis se rendit jusqu'à celle-ci. Elle s'agenouilla auprès d'elle, se rendant compte, par le blanc du regard de la jeune sorcière, que cette dernière était aveugle. De sa main libre, elle prit celle de la jeune fille, puis l'aida à se relever.

- Je suis tout à fait désolée de ce facheux incident. J'espère que vous n'avez pas de mal?

dit-elle en lançant un nouveau regard noir au goblin.

- Voilà, j'ai ramasser vos choses.

ajouta-t-elle en les lui posant dans ses mains.

- Vous veniez pour une ouverture de compte?

demanda-t-elle par la suite.

Alors qu’elle commençait à se relever, bien embêtée pour retrouver ses affaires maintenant qu’elles devaient être éparpillées un peu partout dans le hall, une voix retentit assez près d’elle, sèche et autoritaire. Qui cela pouvait-il bien être ? Elle avait entendu dire qu’une femme dirigeait Gringotts, mais elle ne pouvait quand même pas s‘être déplacée spécialement pour elle ! A moins qu’elle ne passa par là, avait remarqué la scène, et ne tenant pas à offusquer ses clients, était intervenue. Enfin, de toute façon, Eileen ne le saurait sans doute pas. Elle sentit une main se poser dans la sienne, ainsi qu’une présence près d’elle. Elle savait que c’était une femme, grâce au parfum, à la peau, bref à de nombreuses choses que ne captaient même pas ceux qui pouvaient voir. Elle se releva donc, restant stable sur ses jambes, parfaitement calme, bien qu’une très légère rougeur sur ses joues trahisse son embarras. La jeune inconnue allait-elle la considérer comme responsable ? Apparemment pas, puisqu’elle s’adressa à elle avec douceur.

Elle secoua négativement la tête avec douceur, puis on lui mit ses lunettes noires dans les mains, ainsi que sa cane. Elle avait bien sûr rapidement refermé les yeux. Cela choquait bien trop rapidement les autres. Elle remit sans difficulté ses lunettes tandis qu’avec la longue expérience de l’habitude, elle empoignait sa cane et posait le bout au sol, retrouvant ainsi le peu de repères qu’elle possédait. Enfin, on lui adressa un troisième question. Estimant qu’il serait malpoli de hocher à nouveau la tête comme un gamine perdue, elle s’exprima d’une voix douce.

« Il n’y a pas de mal. J’aurais du rester concentrer. Quand à la raison de ma visite, je viens effectivement pour ouvrir un compte. »

Elle se sentait toujours un peu mal à l’aise avec les adultes aussi hauts placés dans la hiérarchie. Ils devaient être de fidèles servants de Voldemort. Surtout qu’elle était à présent quasiment certaine qu’il s’agissait de la directrice, qu’on disait une des plus puissantes sorcières. En effet, la jeune femme avait pris la peine de s’excuser pour l’accident, ce qui prouvait qu’elle se tenait comme responsable. En plus, elle s’occupait apparemment des comptes. Bref, elle supposait qu’on devait la considérer comme inférieure à cause de son handicap, bonne à rien. D’autant plus que la directrice venait de l’aider à se relever…

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